L’histoire de la prise des otages de Khimki
En 2007, les habitants de Khimki, une ville de banlieue moscovite, prennent connaissance d’un projet de construction d’une autoroute à travers la forêt entourant la ville. Ils créent un mouvement pour défendre la forêt et donner une chance à des projets alternatifs, plus écologiques et économiques. L’administration locale néglige invariablement les expertises écologiques, les débats publics et les manifestations citoyennes. Les habitants et les journalistes qui couvrent ce problème sont régulièrement menacés et agressés. En voici quelques cas les plus frappants parmi dizaines d’autres. Un attentat violent contre un journaliste local Mikhaïl Beketov férocement mutilé et abandonné dans la rue (2008), d’échapper à la mort par miracle. Il a dû subir plusieurs interventions chirurgicales et amputations restant gravement handicapé. L’assassinat d’un collaborateur d’un journal local Sergueï Protazanov mutilé et mort le lendemain de l’attentat (2009). L’agression contre un militant pour les droits de l’homme Albert Ptchelintsev kidnappé à Khimki en plein jour et atteint d’un coup de feu à la bouche d’un arme de l’action traumatique (2009). Survécu, il reste handicapé ayant perdu sa voix. Les attentats, à plusieurs reprises, contre un journaliste local Anatoly Iourov, la dernière fois accompagnés de dix coups de couteau (2009). Deux attentats contre un militant local Vitaly Kapytsev, une fois vécu une tentative de l’égorger à son domicile, l’autre fois reçu une bombe dans sa chambre à coucher (2009). Une tentative ratée d’assassiner une militante Evguenia Tchirikova, dans un « accident de voiture » (2010). Les habitants de Khimki défendant leur forêt deviennent les cibles des provocations policières et des attaques d’« inconnus », ils sont brutalement arrêtés lors des manifestations, torturés dans les bureaux de police, le feu est mis à leur voitures et à leurs maisons (voir la chronique détaillée, en russe).
En 2008, la commande de construire l’autoroute à péage Moscou-Pétersbourg passe à la compagnie française Vinci qui, de concert avec sa filiale Eurovia, crée en Russie une SARL Severo-Zapadnaïa kontsessionnaïa kompania (SZKK). Les travaux devraient commencer en mai 2010. D’après l’agence de presse Interfax, « en fin 2009, la Banque Européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque mondiale, la Banque européenne d’investissement, Coface France et la SZKK ont signé un mémorandum d’accord sur le projet de l’autoroute. Néanmoins la BERD n’a pas pris de décision définitive, compte tenu les conséquences écologiques du projet ». Jusqu’à récemment, la Mairie de Moscou refusait également de donner son approbation.
En mai 2009, le Ministère du Transport russe annule l’arrêté No 358/16 du Gouverneur de la région de Moscou, Boris Gromov, selon lequel la zone de 6km en largeur le long de l’autoroute projetée avait été réservée pour « une infrastructure de transport et d’autres objets des grands travaux ». En outre, l’autoroute coupe la forêt en deux et fait un lacet de 8 km au minimum, ce qu’on pourrait éviter en ouvrant la route le long du chemin de fer Moscou-Pétersbourg. Néanmoins, en novembre 2009, le Premier ministre Vladimir Poutine signe l’ordre No 1642 qui reclasse le territoire de la forêt de Khimki en terrain constructible. En mars 2010, la Cour Suprême russe rejette la demande des habitants de Khimki qui réclament l’annulation de l’ordre No 1642 pour son caractère illicite. La demande des habitants est rejetée malgré le fait que le juge avait dû reconnaître le fait d’une falsification des documents concernant l’état du territoire de la forêt.
En juillet 2010, en faveur du projet de Vinci et de Eurovia, l’agence d’Etat russe Les Routes de Russie et une SARL sous-traitante Teplotekhnik se mettent à la déforestation, sans même avoir l’autorisation de coupe. Les habitants de Khimki, les militants des mouvements écologiste et antifasciste, des organismes politiques et des droits de l’homme arrivent sur le lieu de la coupe pour empêcher la déforestation illégale. Leur camp est plusieurs fois attaqué par des bandes mercenaires, les néo-nazis compris, les militants (et non les agresseurs) sont arrêtés par la police et par les CRS. Les abatteuses-tronçonneuses circulent dans la forêt étant couvertes par la Mairie de Khimki et par les forces de la police, toujours manquant d’une autorisation légale de coupe. La percée dans la forêt est ouverte, mais il est encore possible de la rétablir, au cas où un des projets alternatifs de l’autoroute soit adopté. Cependant la Mairie de Khimki ignore constamment chaque tentative de dialogue, des agressions policières et des attentats continuent contre les habitants et les militants.
Le 28 juillet 2010, une manifestation spontanée se tient devant la Mairie de Khimki. Plusieurs centaines de militants des mouvements sociaux, pour la plupart les antifascistes et les anarchistes, s’expriment contre les démarches illicites de la municipalité locale et manifestent leur solidarité avec les habitants de la ville défendant la forêt. Quelques vitres sont brisées, quelques graffitis « Sauver la forêt russe » sont laissés sur les murs. La police n’interpelle personne sur place. Pourtant le lendemain elle « se venge » en mettant en arrestation deux porte-paroles du mouvement antifasciste, Alekseï Gaskarov et Maxime Solopov. Les protocole et les témoignages sont falsifiés, l’arrestation et les perquisitions se déroulent accompagnées des violations graves de la loi. Les deux militants font l’objet d’une détention provisoire pour deux mois, sans qu’une mesure si fortement restrictive soit justifiée. L’accusation en matière pénale est portée contre eux, ils risquent de faire face à sept ans de prison. Une chasse policière s’ouvre contre d’autres participants du mouvement antifasciste.
Aujourd’hui la liberté et la vie des antifascistes emprisonnés sont menacées, la sécurité des habitants et des militants locaux est toujours en danger. Ils ont un besoin fort de votre solidarité !